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Facebook, Tweeter, les dérapages sur les réseaux sociaux ne peuvent justifier une sanction...

Le 03 juin 2016
Facebook, Tweeter, les dérapages sur les réseaux sociaux ne peuvent justifier une sanction...
La Haute Cour encadre les conséquences tirées par l'employeur d'un dérappage sur internet de conditions sévères :
La décision est ancienne mais je souhaitais la souligner.

Dans cette affaire, un salarié avait donné son avis sur Internet concernant le licenciement d’un de ses collègues. En substance, il mettait en doute le motif du licenciement qui a été retenu, laissant entendre des agissements contestables de la part de l’employeur. Considérant que ce salarié avait abusé de sa liberté d’expression, l’employeur a procédé à son licenciement pour faute grave.

Il lui reprochait en effet d'avoir publié sur un site Internet accessible à des personnes étrangères à l'entreprise, un article imputant à l'employeur des faits graves, non établis, en usant de termes excessifs, considérant notamment que dans l'article mis en ligne le 14 février 2011, sur le site internet Miroir social, accessible à des personnes étrangères à l'entreprise, le salarié affirmait que l'un de ses collègues de travail avait été « sanctionné pour avoir soi-disant mal répondu à son chef d'équipe, motif monté de toutes pièces », et que ce « jeune salarié avait osé revendiquer l'application du code du travail », tout en précisant qu'en participant à une réunion de négociation qui s'était tenue avec le directeur régional, lui et ses collègues avaient subi « chantage et menaces déguisés ».

Les termes étaient donc tranchés et exempts de nuance...

La Cour de Cassation, saisie de la question, a tranché en fixant des conditions précises à la prise en considération de propos publics, confirmant une jurisprudence de principe déjà ancienne :

"Mais attendu que l'exercice de la liberté d' expression des salariés en dehors de l'entreprise ne peut justifier un licenciement que s'il dégénère en abus".

Tout est là.

La liberté d'expression est une liberté fondamentale qui ne trouve sa limite que dans son abus. Comme tout droit, chacun en dispose comme bon lui semble. C'est le principe selon lequel seul l'abus d'un droit limite ledit droit.

Pour la Haute Cour, le fait de dénoncer des faits dans de telles circonstances ne caractérise pas l'abus du droit d'expression sur la question.

C'est une analyse, somme toute, théorique parfaite, sauf qu'elle n'est peut-être pas si opportune, car finalement, il s'agit dans un tel cas de confronter deux libertés : celle pour quiconque de pouvoir s'exprimer (et que nous devons bien sur protéger), et celle pour toute personne physique ou morale, de ne subir aucune agression quant à sa probité, son honneur ou encore son image.

Et dans ce match, c'est l'expression agressive qui l'emporte...

Notre droit évolue donc, une nouvelle fois, en faveur de l'acte d'agression, obligeant non pas celui qui parle mais celui qui entend à nuancer sa réaction. On peut donc s'interroger sur les conséquences d'une telle prise de position, même si, de fait, la circonstance de la critique ne cause pas à l'entreprise de véritable préjudice direct à première vue.

Mais qu'en est-il du préjudice plus mesquin et pernicieux de cet avis publié sur un média public, dénonçant, à l'instar des journalistes citant des "sources autorisées" (Coluche s'en amusait drôlement à l'époque), des faits "criticables" ? N'est-ce pas là autoriser le procès d'intention et faire perdre finalement aux Juges eux-même, leurs prérogatives ?

Bien que déplorant de telles évolutions, sources, à mes yeux, d'un relâchement du système à l'égard de ceux qui crient plus fort que les autres, j'invite donc les employeurs à se doter de moult décontractants et autres anti-stress afin d'être en mesure de surtout ne pas réagir à ce type de situation et à faire la sourde oreille.

A jouer à ce jeu, l'on ne peut certainement pas espérer que les choses évoluent et que salariés et employeurs finissent enfin par se rappeler, TOUS, qu'ils sont sur le même bateau !

Si on laisse tout un chacun s'improviser avocat public de toute cause, sans apporter à ce droit d'expression, qui doit être maintenu bien évidemment, un cadre précis, tout cela finira dans une cacophonie dans laquelle personne ne s'y retrouvera, et notre monde n'avancera guère plus vite qu'un escargot anémique et fatigué...

Cass. Soc. 6 mai 2015 n°14-10.781
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Avocat compétent en droit du travail, installé à Mantes la Jolie près de Versailles, Maître Jean Christophe Nappee conseille et assiste les employeurs, salariés et rétraités devant toutes les juridictions compétentes.